Friday, 1 July 2005

Chapitres 121 à 133




Chapitre 121. Lamentations.


1201.
Le souvenir des .délices (passées) cause une félicité, grande et sans fin. L'amour est donc plus délicieux que le vin.


1202.
Le souvenir de l'amant (absent) fait disparaître 'a douleur de la séparation: voyez comme la force de l'amour, quel qu'il soit, est puissante!


1203.
Il me semble avoir envie d'éternuer et je ne subis pas l'accès. Il faut donc que mon amant fasse semblant de penser à moi et qu'en réalité, il ne pense pas à moi.


1204.
Il séjourne toujours dans mon cœur. Ai-je ou non une place dans le sien ?


1205.
(Mon amant) qui monte la garde autour de son cœur, pour ne pas m'y laisser entrer, n'aura-t-il pas honte de se montrer, sans cesse, dans le mien ?


1206.
Je ne vis que par le souvenir de la volupté goûtée dans notre union. A dé faut de cette ressource, par quel moyen pourrai-je vivre?


1207.
Je n'ai jamais connu l'oubli de cette volupté: si je n'y pense pas aujourd'hui, la séparation me brûlera le cœur. Si j'oublie, ce souvenir,
comment pourrai-je ne pas mourir?


1208.
Si souvent que je pense à lui, mon amant ne s'en offense pas;
tant est puissant, l'amour qu'il m'inspire!


1209.
Ma douce vie passe, à penser beaucoup à l'inclémence de celui qui disait: "Nous deux ne sommes pas différents (l'un de l'autre)".


1210.
Vive la Lune! Ne disparais pas au moins, jusqu'à ce que mes yeux revoient celui qui s'est séparé de moi, sans quitter mon cœur.

Chapitre 122. Récit du songe.


ELLE  À LA COMPAGNE
 
1211.
Quel honneur ferai-je au songe, qui m'a apporté le message de mon amant?


1212.
Si je meurs, mes yeux qui, par souvenir de la volupté passée, souffrent de l'insomnie, s'endormiront.  Je relaterai alors à mon amant que j'ai vu en songe, comment j'ai échappé à la maladie de l'amour.


1213.
Ma vie se maintient, parce que je vois en songe, mon amant, qui ne m'accorde pas ses faveurs dans la réalité.


1214.
Le songe  me donne (toutes les  joies de) l'amour, parce qu'il va chercher et m'amène l'amant, qui me refuse ses faveurs dans la réalité.


1215.
La volupté que j'ai éprouvée naguère, en voyant en réalité mon aman,
a été identique à celle que j'ai éprouvée maintenant,
en le voyant seulement en songe.


1216.
Quand je dors, il est dans mes bras. A mon réveil,
il s'empresse de rentrer dans mon cœur.


1217.
Pourquoi donc le cruel qui ne m'a jamais accordé ses faveurs vient il tous les jours, me tourmenter en songe?


1218.
S'il n'y a pas une malheureuse réalité, l'amant qui s'est uni à moi en songe, ne se séparera jamais de moi.


1219.
Il n'y a que celle qui ne voit pas son amant en songe, (parce qu'elle n'en a pas) qui puisse faire grief au mien, de ne pas m'accorder ses faveurs en réalité.


1220.
Les femmes de cette ville reprochent à mon amant de m'avoir abandonnée: Ne savent elles donc pas qu'il vient me voir en songe?

Chapitre 123. Jérémiades a l'approche du soir.


1221.
Vive le Jour ! Es-tu le soir qui venait précédemment? Non. Tu as été,
au contraire, le temps final qui se nourrit de la vie de celle, qui a épousé son amoureux.


1222.
Vive le soir troublé! Tu as, comme moi, des yeux qui ont perdu l'éclat 1 Ta compagnie comme la mienne, a-t-elle donc la propriété d'être sans pité? Dis-le.


1223.
Jadis (alors que mon mari m'embrassait), le soir venait en tremblant et en pâlissant. Maintenant que j'ai la vie en dégoût, et que ma douleur augmente, il empiète de plus en plus sur le jour.


1224.
Le soir (qui venait revivifier ma vie, lorsque mon mari était présent),
vient, maintenant que mon mari est absent, comme le bourreau,
sur le lieu d'exécution, (pour enlever ma vie).


1225.
Quel est le bien que j'ai fait au matin et quel est le mal que j'ai fait au soir ?


1226.
Je ne savais pas, avant le départ de mon mari, que le soir (qui m'a causé tant de joie pendant la présence de ce dernier et qui m'a causé tant de mal depuis sa séparation) fait souffrir.


1227.
Cette maladie (d'amour) éclôt le matin, se développe pendant le jour et s'épanouit le soir.


1228.
Le chalumeau du berger (qui m'a tant charmé) s'est transformé en feu qui brûle, s'est fait le messager du soir et est devenu l'arme qui me tue.


1229.
A l'approche du soir (c'était moi qui, ci-devant me troublais et souffrais), désormais, lorsque le soir viendra, toute cette ville, qui le verra, troublera et en souffrira.


1230.
Ma vie, qui ne s'en est pas allée jusqu'ici, en raison de la séparation, s'éteindra en ce soir mélancolique, en pensant à celui qui considère l'avantage de la richesse, comme le sien propre.

Chapitre 124. Les membres perdent leur beauté.


ELLE
 
1231.
C'est moi qui souffre de cette séparation; cependant, mes yeux, à force de (pleurer) pensant à celui qui est parti au loin, (ont perdu leur éclat et) ont rougi devant les fleurs odoriférantes, qui rougissaient devant eux.


1232.
Les yeux qui pâlissent et versent des larmes semblent révéler aux autres, l'inclémence du bien-aimé.


1233.
Les bras qui se sont enflés (par excès de joie) le jour des noces, s'étiolent maintenant, comme pour révéler avec force, à tous la séparation.


1234.
Les bras qui ont perdu par la séparation, (non seulement la beauté artificielle qu'ils ont obtenue, grâce à lui, mais aussi, leur beauté naturelle, ont encore perdu leur majesté, au point que les bracelets d'or tournent autour d'eux.


1235.
(La matin et le soir se présentent maintenant, dans des conditions autres que celles, dans les quelles ils venaient, lorsque mon mari était avec moi). Les bras qui ont perdu leur beauté naturelle, ensemble avec les bracelets qui tournent, proclament l'impitoyable rigueur du cruel.


1236.
Je supporte ma douleur, mais mes bras ne m'obeéssent pas, ils s'amincissent et laissent tourner les bracelets; je souffre intérieurement encore davantage, lorsque je t'entends lui reprocher toujours, à leur vue, sa cruauté.


1237.
O mon cœur ! Ne peux-tu pas acquérir la gloire, en disant à mon cruel mari, le bruit que fait (en ville) le dépérissement de mes bras?


LUI

1238.
Un jour que je l'embrassais fort, j'ai desserré un peu les bras pour ne pas lui faire da mal. Le front de cette femme ingénue qui porte des bracelets verts a pâli, ne pouvant souffrir ce geste. Que sera-t-il devenu,
pendant toute cette séparation?


1239.
Par suite de ce relâchement, un léger courant d'air s'est glissé entre les corps; (ne pouvant supporter ce courant d'air), les grands yeux frais de cette femme imgenue ont pâli. (Comment ont-ils pu supporter tous ces obstacles: tels que forêts, collins et villes)?


1240.
Ont-ils seulement  pâli  ces  yeux? Ayant aperçu la pâleur du beau front,
ils en ont souffert aussi.

Chapitre 125. Interpellation au cœur.


1241.
O mon cœur ! Ne découvriras-tu pas et ne me diras-tu pas  un remède,
quoiqu'il puisse être, à cette maladie incurable?


1242.
Vive mon cœur! Ton ignorance n'est-elle pas la cause de ce que tu te plains de son indifférence et de ce que tu t'attristes de ne pas le voir revenir ?


1243.
O mon cœur! (tu ne vas pas à lui et tu ne meurs pas ici), tu restes et pourquoi souffres tu en pensant à lui?  Moi, je n'aurai jamais pitié de celui qui m'a causé cette douleur et je ne penserai pas à lui.


1244.
O mon cœur ! (si tu veux aller à lui) amène avec toi ces yeux.
Sinon ils me tortureront afin de se le faire montrer.


1245.
O mon cœur ! Nous le désirons, lui est indifférent. Y a-t-il pour nous un moyen de l'abandonner, parce qu'il nous a dédaignés?


1246.
O mon cœur 1 ( (si je me fâche ) il a le pouvoir de faire disparaître ma colère, en s'unissant à moi. Si tu le vois, tu no peux même pas feindre d'abord la colère, pour te réconcilier ensuite avec lui. C'est donc à faux que tu lui reproches sa cruauté.


1247.
O mon bon cœur! Renonce ou bien à ton amour ou bien à ta honte. Je ne suis pas en état de les supporter à la fois, tous les deux.


1248.
Tu as pensé que, s'il ne m'a pas accordé ses faveurs, par pitié pour ma douleur, c'a été parce qu'il ignorait que je ne pouvais pas supporter ma douleur et tu t'es précipité derrière lui pour lui en faire part! Tu es un niais, mon cœur!


1249.
Mon amant a demeuré en toi-même. Tu le sais mon cœur ! 
Auprès de qui donc vas-tu le chercher maintenant ?


1250.
Il m'a  abandonnée  pour un pas s'unir à moi. Si je le conserve encore dans mon cœur, (outre la beauté extérieure que j'ai perdue) je perdrai encore ma beauté intérieure.

Chapitre 126. Divulgation du aecret d'amour.


1251.
La hache de l'amour brise la targette qu'est la pudeur, la quelle ferme la porte connue sous le nom de secret d'amour.


1252.
Quelque chose gouverne mon cœur en l'opprimant, même à minuit (où tout le monde se repose) ce quelque chose est l'amour: il est donc aveugle.


1253.
Je pense cacher mon amour dans mon for intérieur : mais il n'obéit pas à ma volonté et se manifeste au dehors, comme l'éternuement.


1254.
Hélas 1 Jusque maintenant, j'étais convaincue que je gardais bien le secret de mon mal d'amour. Mais aujourd'hui, mon amour déchirant tout voile, s'est produit en public.


1255.
La dignité, qui consiste à ne pas courir derrière l'amant qui a abandonné,
n'est pas connue de celles, qui sont atteintes du mal d'amour.


1256.
De quelle nature est donc la douleur qui me torture et  qui  m'entraîne à poursuivre l'amant, qui m'a abandonnée? Elle est bien bonne!


1257.
J'étais loin de connaître la honte, tant que mon amant m'a accordé par amour, toutes les satisfactions que j'ai désirées.


1258.
L'arme, qui détruit la fortresse de notre secret d'amour, n'est-elle pas les paroles doucereuses du voleur, qui a le talent do dire plusieurs mensonges?


1259.
(Lorsqu'il est arrivé), résolue à le bouder, je l'ai  fui. Mais j'ai senti que mon cœur commençait à s'unir à lui: aussi l'ai-je embrassé.


1260.
Celles dont le cœur fond à la vue de  leur amant, comme le suif dans le feu, peuvent-elles seulement avoir la pensée de bouder d'abord,
et de s'unir ensuite?

Chapitre 127. Avidité de se rencontrer.


ELLE
 
1261.
Mes doigts se sont usés à compter les jours que j'ai marqués sur la muraille, depuis sa séparation ; mes yeux ont perdu leur éclat et se sont affaiblis, en regardant le chemin par où il doit revenir.


ELLE  À LA COMPAGNE

1262.
Femme chargée  de bijoux   brillants!  Si j'oublie aujourd'hui mon amant, la beauté m'abandonnera dans la naissance future et mes bras s'aminciront, au point de laisser les bracelets se détacher d'eux.


1263.
Avide de conquêtes (et non de volupté), il est parti en dédaignant ma compagnie, avec pour toute compagne, son ardeur belliqueuse et moi je vis encore ici par le désir de son retour.


1264.
Mon cœur se gonfle de joie, à la pensée que celui qui m'a abandonnée me reviendra avec tout son amour.


1265.
Il faut que je revoie mon mari pour consoler mes yeux! Une fois que je l'aurai revu, la pâleur disparaîtra de mes bras délicats.


1266.
Que mon amri me revienne seulement un Jour! Je serai quitte avec cette maladie, qui me fait tant souffrir, et je jouirai alors de la volupté,
par mes cinq sens.


1267.
Au retour de l'ami, qui m'est aussi précieux que la prunelle des yeux, le bouderai-je? ou l’embrasserai-je? ou bien ferai-je les deux (gestes)?


LUI

1268.
Que le Roi engage la bataille et remporte la victoire! J'irai, moi aussi,
rejoindre ma femme et nous nous régalerons le soir.


1269.
A celles, qui attendent anxieusement le jour annoncé pour le retour de celui qui est parti au loin, un jour parait comme sept.


1270.
De quelle utilité seront l'attente du retour, le retour même et le baiser,
si la bien aimée meurt auparavant, ayant le cœur brise?

Chapitre 128. Sens des indices.


LUI A ELLE

1271.
Tu as beau le cacher! Enfreignant tes désirs tes yeux peints me révèlent quelque chose.


LUI À LA COMPAGNE

1272.
Ta Dame a une ingénuité plus Prononcée que celle  naturelle aux femmes,
elle dont la beauté remplit mes yeux et dont les bras ressemblent à une tige de bambou.


1273.
De même que le fil apparaît à .travers les grains de verre qu'il relie, il y a un indice qui apparaît dans la beauté de cette jeune fille.


1274.
Semblable au parfum enfermé dans le bouton de fleur,
il y a un indice révélateur dans le rire de ta naïve Dame.


1275.
Se basant sur une séparation, qui n'est pas dans ma pensée, celle qui a des bracelets serrés garde un secret qu'elle me cache. L'indice de ce secret possède la vertu de guérir mon incurable douleur. (Révèle-le moi).


ELLE À LA COMPAGNE
 
1276.
Le retour de mon amant a grandement adouci ma douleur; mais son union, qui me donne la volupté, tout en calmant ma souffrance, me rappelle cependant sa froideur.


1277.
Ces bracelets ont deviné avant moi (qui connais cependant le sens des signes) la froideur de celui qui a décidé la séparation dans son cœur.


1278.
Ce n'est  qu'hier  que  mon  amant  est parti Cependant la pâleur de mon corps date de sept jours.


LA COMPAGNE À LUI
 
1279.
Elle a d'abord regardé ses bracelets (pour signifier que la séparation ne les laissera pas rester serrés), puis ses bras délicats (pour dire qu'ils s'aminciront aussi et pour vous prier de ne pas laisser ces événements se produire par votre départ), enfin ses pieds Tel est le signe qu'elle m'a fait.


LUI À LA COMPAGNE
 
1280.
No pas communiquer par paroles même à sa compagne, son mal d'amour, mais le lui indiquer par ses yeux; ne pas prier son amant de ne pas lui causer de douleur par sa séparation, mais regarder ses pieds, pour lui signifier  qu'elle  veut  l'accompagner: faire montre d'une féminité plus délicate que celle naturelle aux femmes.

Chapitre 129. Impatience de s'unir.


ELLA A LA COMPAGNE 

1281.
S'exalter rien qu'à y penser et se ravr après s'être vus n'appartiennent pas aux ivrognes mais seulement aux amoureux.


1282.
Lorsque l'amour envahit (intensément) une femme dans la proportion d'un palmier, il ne lui faut pas bouder (si peu que ce soit) dans la proportion d'un grain de millet.


1283.
Bien qu'ils fassent ce qui leur plait, sans faire cas de moi,
mes yeux ne connaissent pas le repos, sans le voir.


1284.
Mon amie! J'ai boudé mon aimé avant de le voir; mais mon cœur (dès qu'il l'a vu,) a oublié (ce sentiment) et n'a songé qu’à s'unir à lui.


1285.
De même qu'en écrivant, l'œil ne voit pas la nature de la plume,
je ne vois pas la faute de mon mari, dès que je l'aperçois.


1286.
Lorsque je le vois. je ne vois pas ses défauts, mais lorsque je ne le vois pas,
je ne vois rien en lui qui ne soit un défaut.


1287.
A quoi bon d'imiter celui qui s'élance dans un courrant. sachant qu'il sera emporté par lui! A quoi bon de bouder, sachant que je ne peux  persister  jusqu'au bout dans ma bouderie ?


LA COMPAGNE À LUI

1288.
Voleur! Ta poitrine ressemble au vin qui est désiré par celui qui prend plaisir à le boire, bien qu'il ne lui cause rien qui ne le conduise à la honte!


LUI

1289.
L'amour est plus délicat que la fleur. Bien peu nombreux sont ceux qui en jouissent, sachant sa délicatesse.


1290.
Mon amante m'a boudé des yeux seulement, mais dans l'union, elle a montré plus d’empressement que moi-même, (ce n’est donc pas elle,
celle qui me résiste avec tant d'acharnement!)

Chapitre 130. Reproches adressés au cœur.


ELLE

1291.
O mon cœur! tu vois combien son cœur épouse son indifférence, lorsqu'il ne pense pas à moi. Pourquoi donc toi seul n’es-tu pas pour moi?


1292.
O mon cœur! tu es bien convaincu de son indifférence à notre égard. Cependant tu t'inclines vers lui, dans la croyance qu'il ne se fâchera pas.
Y a-t-il une sottise plus grosse que celle-ci ?


1293.
Est-ce parce que tu penses que les infortunés n'ont pas de bienfaiteurs en ce monde, que tu le suis comme tu désires?


1294.
(Tu ne songes qu'à te réjouir dès que tu le vois). O mon cœur! tu ne considères pas ses torts, tu ne songes pas à le bouder, dans la mesure du possible,
et à t'unir ensuite à lui. Qui donc peut compter sur toi?


1295.
Toutes les fois qu'il n'est pas près de moi, mon cœur a peur qu'il ne vienne pas. Toutes les fois qu'il est avec moi, il a peur qu'il ne se sépare de moi.
Ainsi il n'y a pas de fin à la douleur de mon cœur!


1296.
Mou cœur est resté ici. Pourquoi? Pour me torturer, lorsque seule,
je réfléchissais aux cruautés de mon mari.


1297.
De concert avec mon cœur insensé, qui n'a pas même la dignité d'oublier celui qui l'a oublié, j'ai oublié moi-mêm ma propre dignité plus précieuse que la vie.


1298.
Mon cœur avide de vivre, croyant que c'est un déshonneur de mépriser celui qui noua a méprisés, pense toujours à sa constance.


1299.
Qui donc nous aidera, si le cœur, dont la fonction naturelle est d’aider la guérison de la douleur qui nous atteint, ne nous aide pas? 


1300.
Du momment que le cœur, notre soutien naturel, ne reste pas nôtre, n’est-il pas aisé aux étrangers de ne pas devenir notre (soutien)?

Chapitre 131. De la bouderie.


LA COMPAGNE A ELLE

1301.
Contemplons un instant  le chagrin qu’il va enduresr.
Au lieu de t’empresser de l’embrasser, boude-le.


1302.
La bouderie est le sel de l’amour. La laisser trop durer équivaut à trop saler la nourriture.


 ELLE

1303.
Ne pas embrasser celle qui boude équivaut à rendre plus cuisante la douleur de ceux qui souffrent.


1304.
Ne pas se concilier avec celle qui boude et ne pas s’unir ensuite à elle, équivalent à couper par les racines la liane, qui dépérit faute d'eau.

LUI EN SOI-MEME


1305.
La beauté des amants, qui sont doués de bonnes qualités, n eat-elle pas l'excès du mécontentement qui pointe dans la cœur des femmes dont les yeux ressemblent aux fleurs?


1306.
S'il n'y a ni froncement de sourcils ni dépit chez l'amante, l'amour ressemble aux fruits trop murs et aux fruits trop verts.


1307.
Douter de la longue ou de la courte durée de l’union, introduit la douleur dans la bouderie, qui est cependant in dispensable à la volupté.

LUI A ELLE


1308.
A’quoi bon de souffrir si l'on n'a pas un amant pouvant comprendre la douleur de l'amante qui a souffert à cause de lui ?


1309.
L'eau (qui est nécessaire  à la  vie) n'est délicieuse qu'à l'ombre; de même la bouderie (qui est nécessaire à l'union) n'est délicieuse que pour les amoureux.
1310.
Pourquoi mon cœur ne fait-il pas cas de la bouderie? Pourquoi s'efforce-t-il de s'unir a celle-qu'il sait capable de le rejeter?  Par la passion.

Chapitre 132. Finesse de la bouderie.


ELLE A LUI

1311.
O amant des prostituées l Tous les êtres, qui ont la nature féminine,
te dévorent des yeux! Je n'étreindrai pas ta poitrine avilie.

ELLE A LA COMPAGNE


1312.
Je boudais. Il a éternué, pensant que je cesserai ma bouderie et que je lui dirais. "Soyons unis pour longtemps!"

LUI A LA COMPAGNE


1313.
J’ai porté une guirlande de fleurs. Elle a prétendu que je la portais pour la montrer à une amante et elle (voulant dire que noua nous  aimions plus que n'importe quels autres deux amoureux) s'est fâchée.


1314.
Je lui ait dit que nous nous aimions plus que les autres. Mais (ta patronne) se méprenant sur le sens de ma parole s’est refrognée tout de suite, disant: "Qui tous? Qui tous?"


1315.
Je lui ai dit (par excès d'amour) que je ne me séparerais pas d'elle dans cette existence. (Croyant que je projetais notre séparation dans l'autre existance), ses yeux se sont remplis de larmes.


1316.
J'ai  pensé à toi, lui ai-je dit, (en bref, au lieu de dire: ‘’je n ai Jamais cessé de penser à toi.’’) Croyant que, du moment que je disais que j’avais pensé à elle, je l'avais oubliée un moment) elle s'est écriée: "Vous m'avez donc oubliée"! Elle, qui allait m'embraser, m’a boudé aussitôt.


1317.
J'ai éternué : elle m'a félicité. (Les hindous croient que seul éternué celui au quel pense un ami absent). Puis revenant sur ses sentiments elle m'a demandé;" qui donc de vos amantes a pensé à vous pour que vous ayez éternué? " et elle s'est mise à pleurer.


1318.
J'ai contenu mon éternuement, (pour ne pas encourir sa colère). C'est pour me cacher que quelque amante a pensé à vous que vous avez fait ce geste, m'a-t-elle dit et elle a pleuré.


1319.
Je lui adresse des prières pour lui faire cesser sa bouderie. Elle me répond. "C'est ainsi que vous avez l'habitude de cajoler vos autres amantes''.


1320.
Suis-je en extase devant sa beauté? Elle me boude encore, disant "à la beauté de quelle amante venez-vous de comparer la mienne"?

Chapitre 133. Charme de la bouderie.


ELLE A LA COMPAGNE

1321.
Je n'ai rien à lui reprocher. Je le boude cependant, parce que seule la bouderie me procure la volupté de ses caresses.


1322.
Par le petit chagrin qua lui cause ma bouderie, la tendresse de mon amant retarde bien un peu, mais elle n'a ensuite que plus de charme.


1323.
Y a-t-il un monde céleste (qui cause autant de délice) autre que la bouderie, pour ceux qui vivent en parfaite union, comme l'eau avec la terre?
1324.
L'arme, qui brise mon cœur désireux de l'union, est renfermée dans son étreinte, qui l'aide a ne pas se séparer de moi.


1325.
Il y a un charme particulier qui se fait sentir, lorsqu'un amant, qui n'a rien à se reprocher, ne peut cependant pas enlacer les bras délicats de l'amante tant convoitée.


1326.
Digérer cause plus de charme que se nourrir; la bouderie cause plus de charme à l'amour que l'union.


1327.
Dans la bouderie des amoureux, il y en a un qui a le dessous:
c'est le véritable vainqueur. Il ne s'en aperçoit pas sur le moment,
mais seulement lors de l'union.


1328.
La sueur, qui perle sur son front, a-t elle le pouvoir de me procurer, une seconde fois, la volupté de l'union, grâce à sa bouderie ?


1329.
Que celle qui est parée d'étincelants bijoux me boude ! Il faut seulement que la nuit se prolonge, pour me permettre de mendier ses bonnes grâces et d'avoir raison de sa bouderie.


1330.
Le charme de l'amour, c'est la bouderie. Le charme de la bouderie, c'est l'union.

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